Samedi 4 juin je prends la direction de Boulogne-Billancourt, et plus précisément celle du Seguin Sound Live, un bar restaurant avec une grande salle au sous-sol disposant d’une scène. C’est là que se déroule la première édition d’un festival de metal à l’affiche 100% française, organisé par le groupe Orkhys, le Metal Inseine, dont je couvre la première journée, et serai relayée pour le dimanche par ma collègue Mily.
Le premier groupe de la journée, de 15h30 à 16h30, est Houle, du black metal breton, inspiré de la mythologie et des légendes. Le groupe se compose d’une chanteuse, d’un batteur, de deux guitaristes et d’un bassiste. Les lumières sont compliquées, tout en rose et bleu, je crains que ce soit le thème couleur de toute la journée, rendant la prise de photos complexe. Le son est trop fort devant, mais nettement meilleur sur les côtés de la scène, il faut choisir entre l’image et le son pour pouvoir bien profiter du concert. Le chant est growlé, le set plutôt rythme, mais les musiciens ont l’air d’avoir du mal à se déplacer, ils sont un peu engoncés sur scène à part la chanteuse qui dispose de plus de liberté de mouvement devant, ce qui nuit un peu au dynamisme général.
Place à Lurking de 17h à 18h pour une heure de death thrash metal d’inspiration fantastique, avec des références à Poe ou Lovecraft. Ils sont également 5 sur scène, avec Ingrid au chant, alternant chant clair et growl, deux guitaristes, un bassiste et un batteur. Ingrid a toujours des looks soignés et sophistiqués qui participent à la mise en scène, comme cet après-midi un long manteau rouge, une capeline noire, un haut clouté et lacé très heavy metal old school, un legging noir façon vinyle, des talons, des bijoux… Les autres musiciens font davantage dans la sobriété en laissant la chanteuse endosser le rôle de frontwoman. Malheureusement au-delà de la mise en scène le son est très brouillon et chaotique, les musiciens demandent régulièrement à l’ingé son d’effectuer des changements, et rien n’améliore vraiment l’ensemble : les guitares et la basse sont un peu assourdissantes, le chant connaît des faussetés, la batterie est fatigante, à vrai dire le son est meilleur lorsque l’on est totalement sur le côté de la scène, ou carrément dans l’escalier. Le festival est une bonne initiative en soi mais l’acoustique de la salle n’est vraisemblablement pas appropriée à de la musique metal, probablement davantage à de la chanson française, à des duos type guitare voix, mais pas à des formations électriques.
De 18h30 à 19h30 c’est Drenaï qui prend place sur scène, et je suis curieuse de voir la prestation de ce groupe, d’autant qu’ils sont nombreux, 7 sur scène, avec un chanteur, une violoniste chanteuse, deux guitaristes, un bassiste, une claviériste chanteuse, un batteur. La troupe porte des tenues médiévales et des maquillages originaux, qu’ils ont pris le temps de peaufiner au fond de la salle lors du concert précédent, dommage que l’on ne puisse pas vraiment voir tout ça distinctement entre la pénombre, la lumière totalement bleue, et l’espace très réduit offert par la scène, obligeant les musiciens à jouer un peu entassés les uns derrière les autres. Ils officient dans un style médiévalo-électrique, certains airs font penser à des musiques de jeux vidéo (par exemple Age of Empire) ou de films. L’allure des musiciens est très sympathique, ils ont des bonnes têtes, des costumes très sympa, leur jeu a l’air de qualité mais le son est vraiment très fort et saturé, ça ne les met pas du tout en valeur (mais aucun groupe n’est mis en valeur aujourd’hui, c’est assez frustrant). Je suppose que Drenaï doit vraiment valoir le coup avec un son plus subtil où les différents instruments et voix se détachent et avec plus de place pour des interactions entre les membres. Ils nous embarquent dans des histoires de sorcières, de tempêtes, ils sont aussi énergiques qu’ils peuvent l’être sur une scène aussi réduite, alternant les moments calmes et mélodiques tirant sur le classique et les passages tumultueux, où le chanteur se fait conteur enragé, ricanant, growlant. Il nous a même gratifiés d’un peu de didjeridoo sur un titre.
Le set d’Orkhys, groupe organisateur du festival, débute avec un peu de retard, à 20h15. C’est clairement le groupe qui a ramené le plus de public, riche en amis, famille, proches. La formule chanteuse frontwoman et musiciens masculins est une fois encore validée aujourd’hui, et l’on retrouve le même batteur que dans Lurking. La chanteuse joue également de la harpe, elle est la seule à être éclairée par un spot dirigé sur elle, alors que les musiciens jouent plus que jamais dans le noir, de plus il est difficile de voir quoi que ce soit avec plusieurs spectateurs des premiers rangs qui filment l’intégralité des morceaux avec leur téléphone portable. Orkhys joue de la musique metal mélodique teintée de sonorités celtiques, notamment un morceau très joli sur la baie des trépassés, avec au passage une petite explication bienvenue sur la légende en question. Les samples sont épiques, les mélodies accrocheuses, malheureusement le même problème persiste : le son est beaucoup trop fort avec les enceintes au max, même avec des bouchons enfoncés à fond dans les oreilles pour supporter le volume, ce qui forcément déforme un peu le rendu. (Le son était en revanche quasiment parfait depuis les toilettes mais bon je n’allais pas non plus passer tout le concert là.) La chanteuse fait l’animation, elle est clairement comme un poisson dans l’eau et aux commandes de la soirée, le bassiste ponctue le set de petites blagues, l’ambiance est détendue en terrain conquis. Pour un des derniers morceaux ils font venir une invitée, Charlène.
Le dernier groupe était censé commencer à 21h30 mais à cette heure Orkys est encore en train de jouer, il reste ensuite les balances et l’installation à faire, et cela fait une demi-heure que je suis dans les escaliers, assez loin mais toujours pas assez pour que le son ne soit pas trop fort. Une migraine s’était progressivement installée au cours de la soirée mais cela devient intenable, et je ne peux pas rester pour le dernier groupe, Hope of Freedom.
Bilan de cette journée pour moi : j’ai vu des groupes prometteurs mais qui n’ont pas vraiment pu être mis en valeur par la salle, peu appropriée au metal, avec une console son décalée par rapport à la scène, et un espace de jeu beaucoup trop petit pour des formations de plus de 3 musiciens. Dans la communication de l’événement il était question d’options de restauration sur place ; il s’agit en fait des plats et boissons servis par le restaurant au rez-de-chaussée, à des prix apparemment normaux pour Boulogne mais très élevés sinon, la bière est plus chère qu’à l’Accor Arena par exemple, et la portion de frites (assez petite) est à 7€. Quand on va voir un petit festival, d’envergure modeste, avec des groupes locaux, et qu’on nous dit qu’il y a des options de restauration sur place, on ne s’attend pas nécessairement à s’attabler dans un restaurant devant des planches de charcuterie et fromage à 22€.
Autre problème selon moi : le rythme. Une heure pour chaque concert (voire plus quand ça déborde), et 30 minutes de battement pour l’installation et les balances, c’est long, surtout pour un festival qui se déroule à l’intérieur, et dans un bâtiment un peu isolé de tout. Les sets de début auraient pu être un peu plus courts, autour de 40 minutes, et les balances un peu anticipées car elles prenaient parfois beaucoup de temps et ça avait l’air bien compliqué, du coup l’enchaînement n’était pas très fluide et ça donnait l’impression d’avoir passé beaucoup plus de temps sur place et pour beaucoup plus de groupes que ce qui a vraiment eu lieu.
Pour finir j’ai l’impression que c’est un festival qui a avant tout réjoui les gens parce qu’une bonne majorité de personnes du public venaient voir des potes, de la famille, des collègues, et qu’une grande partie du plaisir résidait dans le fait de voir des têtes connues. Cela m’a un peu donné l’impression d’une ambiance d’anniversaire plutôt que de festival, ce qui peut être chouette pour les gens venus passer un week-end pour soutenir des amis, mais la qualité sonore et visuelle n’était pas permise par l’infrastructure pour que le Metal Inseine ait l’envergure d’un réel festival, même si l’initiative est à saluer.