… cher pays de mon enfance.
Ah l’ancienne France, la belle et douce, mais aussi l’impitoyable et la cruelle. Entremêlé à l’accordéon musette digne d’un Par(ad)is perdu, le dernier album en date du groupe de Black Metal français Pensées Nocturnes, DOUCE FANGE, saura ravir votre âme d’avant-gardiste prête à se perdre dans les méandres d’une folie touchante et intrigante mettant en lumière la partie ombragée, l’abjection d’une Gaule d’antan complètement délirante suffocant entre des airs de Jazz et de Musique Classique. Alors français… liberté, égalité, indignité !
Commençons donc cette ode aux souvenirs crasseux par le titre plus qu’éloquent, Viens tâter d’mon Carrousel. Combat d’coqs, d’emblée. C’est qui le bonhomme ? La France. S’affirmant par les symboles dès le premier morceau, Pensées Nocturnes arrive en trombe avec des percussions percutantes, oui. Une voix de femme explique, sonnée par des sortes de trompettes, avant qu’elle-même ne parte en vrille – l’esprit gaulois dans toute sa splendeur. Justement, le coq s’énerve. Furibond ce français. L’accordéon ajoute à ce cirque une atmosphère étrange, d’Avant-Garde, et complètement barge. Monsieur Loyal semble coordonner l’ensemble, faisant voler registre orchestral avec un tremplin d’hurlements, de blast beats et de cris. Ce Black Metal délire davantage que ses camarades de troupe, se rapprochant d’un Igorrr. V’nez qu’l’on nous claque la porte au nez maint’nant ! Quel sale boulot ! que dis-je, Quel sale Bourreau. L’introduction se veut plus Jazz que la précédente, les chœurs, les cœurs, d’épouvantes se marient avec le clavier. Les complaintes et pleurnichements reviennent, le clown remercie sa roue déviante. L’agonie perdure et reste belle avec ses notes de piano et trompette disséminées ; le « spleen burlesque », à l’instar de leur premier album Vacuum, également chroniqué, est en toile de fond où la folie fait son cirque. La guitare vient appuyer la composition qui repart vers 3mn26 avant de s’assombrir et y enchevêtrer un orgue de Barbarie avec un chant français. PN mais Costaud !, assurément. Des grésillements avec une rythmique clownesque assurent le show, appuyés par un solo de guitare à la deuxième minute. Un étranger à l’accent anglais récite un poème malsain, satirique et violent – n’oublions pas que le marquis était du royaume. Mais revenons à l’essentiel, la gastronomie. Regrettant pour ma part, l’absence d’un plat végétarien, il n’en demeure pas moins que celui Saignant et à Poings semble fort goûtu car le corps est à l’ouvrage ; continuons donc cette traversée des vices par celui du cann*balisme. Toujours ces mêmes bruissements électroniques mêlés à l’esprit de la fête foraine qui tiennent à ralentir progressivement. Des explications nous sont alors données sur la putréfaction d’un corps dans un milieu humide et la manière de le faire disparaître. L’instrumentation parfaire cette composition sordide à laquelle s’ajoutent chants et hurlements pour un retour aux mélodies avec les notes d’un Padam Padam de notre célèbre Edith Piaf.
Quittons alors cette carcasse pour retrouver le Charmant Charnier, goulet dans cette folie constante. Ambiance instrumentale bizarre à la Carné et la Prévert. La trompette donne le rythme à ce Black Metal déglingo pour ralentir puis repartir et meugler. Passons, il nous en reste tellement à découvrir ! Ne suivons pas le lapin blanc mais le coq tricolore ensanglanté pour aller s’enjailler sur des airs plus latins avec Le Tango du Vieuloniste. Rien de moins argentin que cette introduction qui subsistera en filigrane. Les lamentations sont là. Devons-vous y voir une métaphore gargantuesque d’un carnage ? Quoi qu’il en soit, la boucherie est humaine, Came Roy de Rat nous l’atteste sur la pochette – je ne peux apprécier le repas sans penser au morceau Pieces of You d’Annihilator, âme sensible s’abstenir. Agonisons lentement avant notre arrêt brutal par Fin Défunt et sa sirène entêtante. L’instru’ est limite Rap et j’ose espérer que le fond n’est qu’imagerie brutale sur notes « shredées ». Le chapiteau nous étouffe et la mélodie se fait de plus en plus vite, à la ritournelle d’une Hungarian Dance n°5 in G Minor de Johannes Brahms, en condensant la folie pour y revenir avec le décorum de ce freak show franchouillard. La fin n’est pourtant pas finie avec La Semaine Sanglante et sa guitare pleureuse, ponctuant ce Black alors « bluesy » et mélodramatique. Néanmoins, cela serait sans compter sur la force des belligérants ; chaque camp ayant pour même bagage, un cirque enflammé et prêt à en découdre, loin de Zavatta ou Bouglione – et heureusement, avec du swing s’y ajoutant. Le dernier numéro s’annonce dans la continuité à coup de Gnole, Torgnoles et Roubignoles. Roulement de tambours et c’est décadent. L’amant de Saint-Jean est fou, la bande à Bonnot est bourrée et boiteuse dans ce tohu-bohu bien français et grivois.
Allons donc enfants de la patrie et réjouissons-nous de cette traversée patriotique dans un neuvième cercle de l’enfer qui pourrait nous être réservé à nous, égrillards. Rendez-vous au Hellfest, Pensées Nocturnes, afin de festoyer au nom de notre belle folie !
Liste des morceaux :
1. Viens tâter d’mon Carrousel
2. Quel sale Bourreau
3. PN mais Costaud !
4. Saignant et à Poings
5. Charmant Charnier
6. Le Tango du Vieuloniste
7. Fin Défunt
8. La Semaine Sanglante
9. Gnole, Torgnoles et Roubignoles
Titres emblématiques de l’album : Viens tâter d’mon Carrousel, Quel sale Bourreau, Saignant et à Poings, Fin Défunt, La Semaine Sanglante et Gnole, Torgnoles et Roubignoles.
Titre original : Le Tango du Vieuloniste.
Titre(s) dont on aurait pu se passer : PN mais Costaud !.
17/20