De ce rien qui est… pourtant omniprésent.
Combinant la combativité d’une pulsion de vie agressive à un néant réticent et indomptable, à ce rien pourtant présent mais insaisissable, les américains du groupe de Deathcore Fit For An Autopsy continuent de disséquer, non sans quelques pas de côté, un dépeçage douloureux dans ce rien qui est – The Nothing That Is.
Continuons alors, et avec cette nouvelle œuvre, de naviguer entre les paradoxes. Celle-ci débute par Hostage, comme par hasard. La batterie donne le la avec un rythme rapide avant de revenir sur quelque chose de martial, réfléchi, qui emplira ce premier titre. L’ensemble alterne entre cette rythmique frénétique et des voix très présentes, passant du growl au clair mais d’une manière à ce que nous les distinguions clairement – l’aspect coreux se mariant avec la profondeur d’un cri venant des abysses. La guitare ne se fait pas prier avec une fin des plus progressives… Avant de retrouver le butin tant attendu. Spoils Of The Horde commence assombrie mais ne tarde pas à revenir au canon du groupe de par, et notamment, l’accélération de la batterie. La guitare se veut plus mélodieuse avant que des hurlements plaintifs ne surviennent et qu’un cri de désespoir ne soit lancé à l’intention du feu. L’embrasement est proche. Il nous a consumé. En effet, Savior Of None / Ashes Of All. L’introduction est vraisemblablement Deathcore et le doux – ici amer, trio batterie, guitare et cris, se la joue ode à la mort. Les chants se veulent compréhensibles bien qu’amalgamés, comme porteurs d’un message étendu par les envolées de la gratte. La suite est plus sombre encore, à l’orée d’un Black/Death scandinave arrivant à l’acte d’absolution du haut d’un hurlement terrifié. Le retour se veut dans le maelström, plus terre-à-terre, primitif, originel. L’artiste s’étant chargé de la pochette n’osera nous contredire. Quoi qu’il en soit, et le fil directeur de Fit For An Autopsy dans ce nouvel album est là : l’absence d’échappatoire. Que voulez-vous, la finitude continue de faire couler beaucoup d’encre, et de faire gémir autant de notes et phrasés véhéments. Weaker Wolves est moins subtile et plus Hardcore. La voix est rauque et une sorte d’écho radiophonique s’entend. Les plus faibles ne le sont plus puisqu’ils sont morts – ou vont mourir. L’horizon n’est donc pas des plus joyeux, il est rouge, rouge sang. Red Horizon est introduit plus sobrement avec des silences et quelques notes harmonieuses. L’explosion est donc des plus brutales avec la redondance de la rythmique. Les chants clairs tentent d’alléger cet agglomérat en nous offrant un pseudo temps d’accalmie avant qu’une voix d’outre-tombe n’arrive aux ¾, suivie de son cortège macabre Blackened. On aime ! L’effet des chœurs, dans cet espace où nous nous sentons esseulés, nous submerge. L’arrêt est brutal.
Le pinacle est là. Morceau éponyme, The Nothing That Is est bien là, présent, pe-sant. Les permutations de la voix – ces instruments d’autopsie, se rejoignent encore, mais avec une prépondérance pour l’aspect mélodieux, donc moins pêchu, mais avec un fond qui reste lourd, pénible. C’est toute la subtilité d’un bon Deathcore. La précision est digne d’un Meshugaah. De facto, les breakdowns sont incisifs et contrastent davantage, à l’instar de la note aiguë de la guitare arrivant comme une cerise sur le gâteau, un rien faisant toute la différence. Lurch, « tromper » ou « s’arrêter brusquement », se hisse pourtant lentement, à l’instar du cri plaintif et étouffé. L’instrumentation est mélancolique et la voix claire arrive progressivement avant de se stopper soudainement et d’exploser. Le mouvement (musical) porte bien son nom ! Bref, non, enfin, là, si, laissons. L’accélération devient nerveuse. Quelques passages rappellent Architect et d’importants breakdowns apparaissent vers la fin. Le cri s’amenuise. Quelle étrange incohérence ! Que voulez-vous, les mouvements de l’esprit sont souvent impénétrables… même pour leur auteur. Et c’est ainsi que purpose devient lower – Lower Purpose. La bassesse, que dis-je, la propension habituelle des « horrors that the human race has unnecessarily inflicted upon the world » est ici décrite par Fit For An Autopsy directement. Les grésillements traduisent cette confusion permanente menant à cette envie de tout contrôler, quitte à détruire et rester chaotique sans jamais se l’avouer. Mais finissons-en. Lust For The Severed Head est sans ambages, typique d’un Black Dahlia. Ce rien arrive alors. Ce trou béant, The Silver Sun est au zénith. Il y reste longtemps, c’est le seul titre de plus de 6 minutes. Le rayon du soleil, la ligne de guitare est inhabituelle et l’introduction, moins affirmée, plus mélodieuse, plus Metalcore. Il y a plus de parties instrumentales que de growls, il est plus introspectif et flou quant à l’avenir, mais ça, nous le savions déjà.
Ce rien pourtant quelque chose est donc examiné, autopsié, analysé puis commenté par Fit For An Autopsy qui n’en développe pas davantage, préférant que ce néant parle pour lui-même – et pour nous.
Liste des morceaux :
1. Hostage
2. Spoils Of The Horde
3. Savior Of None / Ashes Of All
4. Weaker Wolves
5. Red Horizon
6. The Nothing That Is
7. Lurch
8. Lower Purpose
9. Lust For The Severed Head
10. The Silver Sun
Titre(s) emblématique(s) de l’album : Hostage, Spoils Of The Horde, The Nothing That Is, Lust For The Severed Head
Titres originaux : Savior Of None / Ashes Of All, Red Horizon et The Silver Sun
Titre(s) dont on aurait pu se passer : Lurch
15/20