Que la finitude est inspirante…
Tirant leur nom de la première campagne du jeu de rôle de l’univers de fantasy suédois Drakar och Demoner, Ereb Altor, groupe de Black Metal, sortit leur neuvième album Vargtimman en 2022. Mêlant chants anglais et suédois pour une signification mystérieuse de « pauvre homme », « en difficulté » voire, reprenant, peut-être, le nom d’un film d’horreur intitulé L’Heure du loup, cette œuvre complète à l’aura sombre et froide, Death, Doom et Ambiant, est une ode guerrière, belliqueuse mais aussi poétique et enchanteresse. Âmes d’antan pour cœurs vaillants, nous arrivons.
Vargtimman débute par le titre I Have the Sky. Alliant différentes euphonies pour un rendu sombre et solennel à la Bathory, les premières notes nous appellent au combat d’une manière a cappella avant que ne s’ajoutent la guitare et le reste des instruments. La voix alors puissante, n’est pas sans rappeler certaines intonations d’ICS Vortex d’Arcturus ou de Borknagar et Dimmu Borgir. La ligne de basse est intéressante et le solo suivant à 2:45 semblent rappeler quelques envolées de Death Mélodique à la Insomnium. La fin est en parallélisme avec l’introduction. S’ensuit le morceau éponyme de l’album et de son entrée davantage Black à l’orée d’une influence marquante d’un Emperor où l’accent a été mis sur la mélodie ; l’aspect mélodique emplit donc l’album en s’immisçant parfois sinueusement mais d’une façon correctement entendable parmi les notes plus incisives et brutales. Des hurlements viennent ponctuer le tout, délicatement atténués par un murmure pour un retour plus mélancolique et doux. L’homme en difficulté prend tout son sens ici, ou le perd, au contraire, c’est à voir. Le récit dicté par Ereb Altor se continue alors, au sein de nimbes reculées et quelque peu plus apaisées avec Fenris – c’est son heure. La vague Ambiant à la Summoning ne fait que passer avant que ne reprenne ce cœur volontaire et croyant, à moins d’une minute et qui perdurera dans le jeu de guitare venant clore la cavalcade monstrueuse de ce loup majestueusement enragé. Rise of the Destroyer prolonge cet état de démence par un agglomérat Blackened, dans le fond comme dans la forme, et avec une fin brutale…
… et en toute logique avec la suite de cette cérémonie : Alvablot outrage, en référence à l’álfablót, sacrifice pagan et scandinave où les premières notes se donnent un aspect prophétique, grave et enchanteur. Le chant se veut pourtant qu’anglais, comme pour toucher le plus de fidèles ; les chœurs aidant, renforçant l’auguste présence divine. La guitare venant, au détour d’un instant, en parfait équilibre temporel, rendant l’ensemble éploré mais nécessaire, à la Death Mélo’. Vint alors, Den Dighra Döden, ou La mort de Dighra. Des corbeaux se font entendre, serait-ce ceux d’Odin ? Hugin et Munin ? Et une voix, des paroles suédoises et un ton possédé, nous délivrant une vaticination avant de n’éclater vers 1:25, à l’instar d’une rythmique et intonation retrouvées chez Rotting Christ et In Twilight’s Embrace. La tourmente repart après un court moment d’accalmie pesante. Nous sommes donc dans les ténèbres, Ner i Mörkret. L’introduction se veut stressante. Tout n’est que progression, ou transgression (?), avec ajout des percussions à 20 secondes et du chant à 1mn32. Des rapports s’entrechoquent avec certains passages plus atmosphériques, enivrants et lourds, à la Saor ou Isole ; nous sommes en quelque sorte, sur les eaux sinueuses du Styx, ou de la Mort, plus directement, comme avec l’ensemble représenté sur la pochette par l’artiste Christina Olsson. Plus Doom encore, terminons la procession par Heimdals Horn. La corne du célèbre dieu nordique conclue en apothéose ce chemin de croix où les chœurs s’y mêlent de bon cœur pour une fin mélodieuse mais fatalement impatiente d’en finir ; les quelques notes de guitare viennent panser nos blessures…
Album romantique et fièrement guerrier, les âmes vikings ayant trépassé au combat transparaissent sensiblement, affichant la beauté d’un parcours épique et presque sans égal. Merci Ereb Altor et hâte de vous retrouver au Hellfest 2024, sous l’obscurité de la Temple.
Pistes :
I Have the Sky
Vargtimman
Fenris
Rise of the Destroyer
Alvablot
Den Dighra Döden
Ner i Mörkret
Heimdals Horn
Titre(s) emblématique(s) de l’album : I Have the Sky, Fenris, Alvablot et Heimdals Horn.
Titre original : Alvablot.
Titre(s) dont on aurait pu se passer : Aucun, l’album est cohérent.
16/20