Rédemption immanente ?
Du haut de leur statut de tauliers jugé parfois en dent de scie, il n’en demeure pas moins que depuis les années 1970, Saxon, groupe britannique à l’aura planante, n’a cessé de se réinventer en gardant ce qui les définit : une énergie caractéristique et presque suffocante domptée par des percussions et guitares en équilibre constante pour une voix mélodieuse et incisive. C’est alors qu’à l’orée de cette nouvelle année, les anglais ont décidé de nous envoyer en plein visage, leur dernier album intitulé Hell, Fire And Damnation où clairement, tout est dans le titre ! Entremêlant Thrash, Speed, Heavy et tutti quanti, c’est une entrée en trombe que nous font les saxons !
Commençons donc par le commencement où comme tout bon groupe de Heavy et Power qui se respecte, débute son histoire héroïco-fantastique par l’annonce d’une Prophecy divinement funeste. L’introduction est mystérieuse, une sorte de créature démoniaque ressort grâce au piano et à l’orgue apocalyptique. La voix conte l’histoire de la fin du monde à la Iron Maiden voire à la Thriller d’une manière donc prophétique. Le titre est donné avant d’enchaîner directement sur le prochain titre éponyme de l’album. Le rythme est posé. Hell, Fire And Damnation est là. Les percussions sont martiales, à la Metallica, avant que ne partent des sonorités Heavy et Thrash et un solo à la moitié du morceau – structure retrouvée dans ce qui suivra. Les tendances monarchiques retrouvées dans certains gènes français trembleront (mais sans tomber !) à l’annonce de Madame Guillotine. Par son départ original et plus Djent, c’est post tête coupée et sang coulé que surviennent les premières paroles. L’explosion est écarlate avant que ne reprenne l’instru’ originelle et perdurant tout du long. La richesse des soli est de mise où ici, l’accent est mis sur la balade de presque 2 minutes. Mais reprenons avec une création plus rapide, Speed, Thrash et Heavy. Fire And Steel se veut conquérant ; la guitare hurle et n’en démord pas, au contraire, saisissant sa propre ligne d’expression fugace aux échos d’un certain Vai. There’s Something In Roswell arrive sans crier gare, à l’instar des protagonistes de l’épopée sublunaire arrivés aux États-Unis. L’introduction est saturée et la batterie lourde et pesante. Le solo est, encore une fois, déchaîné et découplé. Saxon nous partage donc son grand œuvre, moins hermétique mais si cathartique.
Notre tour du monde à la visée apparemment rédemptrice continue en Mongolie et à Venise avec Kubla Khan And The Merchant Of Venice. Les prémices sont radiophoniques et saturées avec ajout d’un chœur au sein de la voix claire et d’un solo plus Progressif. Pirates Of The Airwaves n’en reste pas moins inchangé avec une introduction qui grésille et une longueur de gratte plus aiguë. Arrivons en Angleterre à la date de 1066 pour la fameuse bataille d’Hastings opposant Guillaume le Conquérant, duc de Normandie, et Harold Godwinson, roi anglo-saxon. Par une arrivée Death, somme toute logique, mais revenant à leur essence Heavy et Power de cette histoire racontée, la guitare est davantage langoureuse – peut-être plaintive, avant de repartir plus rapidement. Le thème de la guerre est donc en filigrane de cette rédemption se voulant immanente au cours de l’Histoire, Witches Of Salem n’en faisant pas exception. Des hurlements et cette même structure répétitive mais qui fonctionne. La fin en résonance nous donne de l’espoir… celui de la vie, mais laquelle ? Super Charger est enivrant, presque suffocant ; la morale de cette histoire est ce cycle qui semble infini où nos choix nous gouvernent et nous conduisent jusqu’à l’endroit désiré, que cela soit sur le chemin de la rédemption ou de la destruction.
La notion d’« espèce humaine » comme développée par l’écrivain et résistant français Robert Antelme n’en est donc pas aux balbutiements de ses horreurs ; Saxon la représenta en sons et images fulgurantes traversant notre esprit de damné. L’archange libérateur de la pochette n’en ai pas à son premier coup d’essai, pointant son épée vers les Cieux avant d’abattre sa Lumière sur ces Enfers misérables, espérons-le une dernière fois.
Liste des morceaux :
1. The Prophecy
2. Hell, Fire And Damnation
3. Madame Guillotine
4. Fire And Steel
5. There’s Something In Roswell
6. Kubla Khan And The Merchant Of Venice
7. Pirates Of The Airwaves
8. 1066
9. Witches Of Salem
10. Super Charger
Titre(s) emblématique(s) de l’album : The Prophecy, Hell, Fire And Damnation, Fire And Steel, Witches Of Salem et Super Charger.
Titre original : 1066.
Titre(s) dont on aurait pu se passer : Aucun, l’album est cohérent.
18/20