Février 2025. Sur l’affiche du Download Festival, un nom tombe de nulle part : President. Aucune info, aucun son, juste un logo froid, quelques slogans Orwelliens et un silence volontairement pesant. De quoi alimenter la rumeur : qui se cache derrière cette façade politique ? Deux mois plus tard, la réponse arrive. Ou plutôt, la déflagration.

Le premier single, In the Name of the Father, balance un uppercut : électronique glitchée, riffs anguleux, voix vocodée sortie d’un prêche cybernétique. C’est agressif, déroutant, et surtout maîtrisé. On comprend vite que la machine britannique sait comment manipuler la curiosité.

Dans son ADN, President marche sur les traces de Sleep Token, mais avec un côté plus martial, plus frontal. Même culte du secret, même goût pour la symbolique religieuse et le storytelling total : les tournées deviennent des campagnes, les clips des broadcasts, et chaque publication, un acte de propagande. Rien n’est laissé au hasard. La mise en scène est chirurgicale, presque militaire, et c’est précisément ce qui fascine autant que ça énerve.

Évidemment, Internet a fini par démasquer le coupable : Charlie Simpson, ex-Busted et Fightstar, tire les ficelles. Mais loin de chercher la rédemption, le gars a monté son propre empire. Pas de label, pas d’intermédiaire — President est un projet auto-produit de bout en bout. Une opération commando, pensée et exécutée par un vétéran revenu des tranchées du Rock alternatif. Sous le masque, c’est pas un imposteur : c’est un survivant.

L’EP, King of Terrors, tire son nom d’un vers biblique : « Il sera arraché du milieu de sa tente où il est en sécurité, et forcé de marcher vers le roi des terreurs« . Le ton est donné : mort, endoctrinement religieux, et perte de soi. Les thèmes sont lourds, mais la mise en son encore plus pesante.

Fearless ramène les guitares au premier plan. Moins d’Électro, plus de chair. Un riff sec, une voix moins trafiquée mais tout aussi habitée : du Metal alternatif dopé à l’adrénaline. Pas de frontières nettes, juste une envie d’expérimenter. Simpson construit son mur du son à coups de beats cybernétiques et de guitares massives — ça cogne, ça respire, ça avance.

Rage s’inspire du poème de Dylan Thomas « Do Not Go Gentle Into That Good Night« . Un mid-tempo à la tension rampante, mené par des nappes électroniques et une voix vocodée à fleur de peau, jusqu’à un final explosif. Le morceau divise, certains crient à la surproduction, d’autres y entendent un sommet d’émotion contenue. Mais soyons honnêtes : dans le Metal moderne, la surproduction est devenue une arme. Comme Jordan Fish l’a prouvé chez Bring Me the Horizon, le son est une architecture, pas un maquillage. Et Simpson l’a bien compris.

Destroy Me reprend la même recette, mais avec plus de hargne. Couplets synthétiques, refrains clairs hurlés, gros breaks de guitare : la formule est basique mais imparable. En live, les effets vocaux disparaissent presque entièrement, laissant place à un frontman capable de tout sortir à la force du diaphragme. Pas de triche, juste du contrôle.

Enfin, Conclave clôt le disque sur une note introspective. Piano spectral, falsetto torturé, tension contenue. Le masque tombe partiellement, révélant une fragilité inattendue. Une fin de cycle plus qu’une conclusion.

Au final, King of Terrors est une déclaration d’intention plus qu’un disque parfait. Un manifeste d’indépendance, un doigt d’honneur au système, un pied dans la tombe et l’autre sur un pad de batterie électronique. Pas un chef-d’œuvre, pas une escroquerie non plus — juste un projet sincère, habité, qui promet des lendemains massifs.

President vient à peine d’être élu, mais son règne pourrait durer.

15/20


Tracklisting :
1-In the name of the father
2-Fearless
3-Rage
4-Destroy Me
5-Dionysus
6-Conclave

Titre incontournable : In the name of the father
Titre dont on aurait pu se passer : Dionysus
Titre ovni : Rage

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