Goodbye Charlie
On a pas mal hésité à chroniquer cet album. Pas parce qu’on n’aime pas les Rolling Stones chez Mélolive, mais plutôt parce que s’attaquer à des monstres sacrés pour en faire la critique c’est assez hasardeux pour ne pas dire présomptueux. Et en même temps parce que ça fait tellement longtemps que le groupe n’a rien sorti qu’on est en droit de se demander si ceux qui le composent ont encore le feu. Et puis finalement, sur le tard on le tente.
Tout d’abord il est à noter que cet album sera le tout premier enregistré sans Charlie Watts à la batterie. Le plus sobre des membres du groupe (la nature est cruellement ironique parfois) s’en est allé rejoindre Brian Jones, le nageur professionnel, au firmament du grand rien. Reste maintenant à savoir lequel des rescapés sera le dernier entre le guide du queutard compulsif, le sniffeur au père et l’éternel remplaçant en bois. La course est lancée, faites vos jeux, mais en attendant voyons ce que ce demi line-up a encore sous le pied.
On démarre par le single Angry. La prise de risque est minime, le morceau est un pure produit Rolling Stones, on a le riff à la Telecaster, le refrain balancé par un Jagger qui ne semble pas avoir pris une ride vocalement (il y’a un pacte derrière ça, c’est obligé) et une structure musicale assez simple et efficace. Avec Get Close on reste dans la même veine, avec un côté plus léger dans la mélodie. On appréciera (ou pas) le retour du Saxophone pour un solo qui nous ramène directement dans les sonorités 80’s. C’est Depending On You qui va casser un peu la rengaine en proposant une ambiance plus mélodique avec un petit coté Bob Dylan. L’orchestration s’enrichit énormément sur ce titre avec des chœurs, de l’orgue hammond et du piano. C’est une balade Folk mais joué en électrique. Bite My Head Off va sonner plus brut avec un petit son plus Punk sur les bords. Un titre typiquement anglais qui ramène à la fin des années 60 avec son solo approximatif, exactement comme on faisait des solos à l’époque et un final à l’arrache. Jusqu’ici on est dans la zone de confort du groupe, mais avec le titre suivant Whole Wide World on va tenter des sonorités un peu plus exotiques avec des effets de Phaser sur les guitares et un rythme plus sautillant. Le morceau sonne du coup nettement plus Pop que les précédents, un peu le Rolling Stones des années 80, plus commercial et consensuel.
On est déjà à mi-parcours et le groupe nous ramène dans le bayou avec un titre plein de slides joués au bottleneck sur une guitare à résonateur. Dreamy Skies fait nettement plus référence aux débuts du groupe. La voix est mixée très en avant avec une optimisation de la stéréo très importante, les guitares sont vraiment aux extrêmes dans le gauche/droite à l’ancienne. Un solo d’harmonica vient parfaire le tableau. Vocalement, ce n’est pas le titre le plus intéressant de l’album, mais on se laisse quand même embarquer dans ce voyage. Mess It Up nous ramène à l’époque de Start Me Up qu’il n’est pas sans rappeler de par la similitude rythmique au début du titre. La comparaison s’arrête là car très vite une ambiance disco s’installe grâce à une basse très présente au groove si particulier de ce genre musicale. Le refrain de ce titre est diablement efficace. Pour nous, c’est le second single de l’album et il nous aura fallu vérifier ça sur Youtube pour en avoir confirmation (comme quoi on a le nez !). Avec Live By The Sword, on revient au Rock des Stones très british avec une touche de piano pour accompagner les guitares et le tambourin qui apparaît en virgule sur de courts passages. Les solos s’enchaînent sur ce titre qui fait taper du pied.
Dernière ligne droite de cet album. En général c’est à ce moment-là qu’on glisse les titres moins calibrés, les morceaux plus longs et les masterpieces plus ambitieux moins à la portée du grand public qui n’écoute que la radio. Et ça ne rate pas avec Driving Me Too Hard qui introduit des guitares countrysantes toujours jouées au bottleneck. Un titre peut être un peu plus faible que les autres mélodiquement parlant, mais on reste sur de la valeur sur avec un gros travail sur les arrangements qui devrait plaire au public des Stones. Tell Me Straight laisse Keith Richards prendre le micro à Mick Jagger pour une petite récréation. Le guitariste s’en sort très bien vocalement. Il faut dire que le titre n’est pas ultra technique, on pourrait même dire qu’il est assez plan plan. Sweet Sounds Of Heaven est un Blues avec un piano/Basse/voix qui laisse les guitares jouer les ambianceuses. Le titre est long, il prend son temps pour s’installer. Jagger commence seul, mais il est rejoint à la deuxième minute par Lady Gaga en seconde voix. Sur le refrain suivant, les deux voix se complètent pour monter encore d’un cran en puissance. Ça fait plaisir d’entendre Gaga sur autre chose que de la Pop surproduite, elle démontre une fois de plus qu’elle n’est pas qu’un coup marketing d’une mode qui s’essouffle avec une voix au top pour répondre à celle de Jagger. Pour nous, c’est le meilleur titre de l’album pour son intensité. Pas un moment on ne s’ennuie pendant les 7minutes 22 de la piste. Pourtant on ne peut pas dire que le propos soit ultra riche, mais là encore, des arrangements très bien amenés et un jeu de question/réponse avec des variations d’ambiance pour mettre du relief en font un des titres les plus intéressants du disque.
L’album se termine sur un Blues comme on en jouait dans les années 30, comme pour boucler la boucle de l’histoire de The Rolling Stones avec un retour aux sources de leur inspiration. On comprend la portée symbolique de cette démarche avec Rolling Stone Blues joué uniquement en acoustique à la guitare section rythmique avec pour tout arrangement l’intervention d’un harmonica pour ponctuer le chant. C’est un Blues à l’ancienne avec la qualité sonore d’aujourd’hui. On s’y croirait. Impossible de mettre un tel morceau en ouverture d’album sans perdre la moitié des gens. Mais c’est une chanson parfaite pour finir cet album.
Hackney Diamonds n’est pas qu’un album de plus des Rolling Stones , pour renflouer les comptes en banque de Jagger et soutenir la consommation de stupéfiant de Keith Richards. C’est un vrai bon album du groupe. On ne l’attendait pas forcément, c’est donc une excellente surprise que le groupe nous offre. On gage que cet album tiendra sa place dans les playlists du groupe à venir sur les comptes des plateformes.
Tracklisting :
Angry
Get Close
Depending On You
Bite My Head Off
Whole Wilde World
Dreamy Skies
Mess It Up
Live By The Sword
Driving Me Too Hard
Tell Me Straight
Sweet Sounds Of Heaven
Rolling Stone Blues
Titre emblématique de l’album : Angry
Titre dont on aurait pu se passer : Tell Me Straight pour son côté traînant qui colle moins au reste de l’album
Titre ovni : Rolling Stone Blues, pour son anachronisme assumé
19/20