Pour mon premier concert au Petit Bain depuis un long moment, c’est un programme homogène et cohérent qui m’attend avec une triade française 100% black metal : Seth en tête d’affiche, et ses deux premières parties, Thagirion et Merrimack.
À 18h55 c’est Thagirion qui a ouvert le bal du diable, pour ce qui vraisemblablement le tout premier concert du groupe, existant depuis 2011 mais dont l’EP « On the path of shattered bells » (également le morceau inaugural du set) date seulement de 2021. Je ne connaissais pas du tout la formation, mais j’ai été surprise d’apprendre que son pilier, Vagus Nox, aux commandes de tous les instruments tour à tour, avait joué avec Mayhem, Abbath, Goat Torment, Loudblast, Satyricon, Shining, Svart Crown et j’en passe… Donc un groupe à la fois très récent mais déjà fort confirmé. Sur scène Vagus Nox à la guitare était accompagné des membres fixes Spir Ignis au chant et de CsR à la batterie ainsi que d’un bassiste et d’un guitariste de session. Ils ont livré un show musclé, froid, impartial, rapide. On ne peut pas dire qu’il y ait eu beaucoup d’interactions ni de mise en scène, les musiciens étaient juste là pour jouer – et bien jouer. Le son n’était pas toujours bien réglé, trop fort, avec des paroles un peu noyées et dures à discerner, mais une belle énergie était constante du début à la fin, quelque chose qui tenait en haleine tout le long des 50 minutes de la prestation. Sur le dernier titre, « Vanguard », le groupe fut rejoint par le guitariste de Seth, caméo fort apprécié par le public du Petit Bain.
Setlist : 1) On the path of shattered bells 2) Soil of Hunger 3) When I have died 4) Call for the Void 5) Grand Serpentrion King 6) Hosana Oblivion 7) Toward the Black Sun of Violence 8) Stellar Master Elite
À 20h05 c’est au tour des membres d’un autre groupe francilien de faire son entrée surles planches du Petit Bain, Merrimack, dont je n’avais jamais entendu parler alors qu’il est actif depuis 1994, bigre, je ne suis pas du tout à jour… Je suis immédiatement happée par la noirceur et l’intensité qui se dégage de la formation (un quintet chanteur, guitaristes, bassiste et batteur), mais surtout du chanteur, à la gestuelle torturée, au jeu de scène lugubre, qui semble habité : ses muscles sont tendus, il s’agrippe au pied de micro, fait mine de s’étrangler avec son long fil, nous asperge d’eau avec sa crinière trempée lui retombant sur le visage… So depressive black metal. Je suis un peu frustrée de ne pas bien entendre le chant vu que décidément ce soir c’est un jour sans pour le son au Petit Bain, j’aimerais bien savoir ce que racontent les paroles et voir à quel point elles s’accordent avec la lourdeur sinueuse et l’atmosphère de transe qui se dégage du concert. Après 50 minutes de show face à un public concentré mais plutôt calme, le groupe s’éclipse. Un spectateur s’approche de moi et me demande sur le ton le plus normal qui soit « Ça va, le chanteur ne vous a pas agressée ? Parce que d’habitude il frappe des gens, donc tant mieux s’il ne vous a rien fait, vous avez eu de la chance, parce que vous auriez pu perdre un œil », AH. Ben chic alors. Je n’ai pas été témoin de quoi que ce soit de suspect ce soir mais ce genre de propos fait toujours un peu retomber l’enthousiasme inné, qu’on le veuille ou non…
Setlist : 1) When the stars align 2) Seraphic Conspiracy 3) The falsified son 4) Hors defeat Thorns 5) Redeem Restless Soul 6) Ashes of Purification 7) Vanguard
À 21h25 c’est clairement le clou du spectacle qui arrive théâtralement sur scène ; il est plus que certain qu’une écrasante majorité du public de ce soir est venu pour Seth. J’avais eu un gros coup de cœur pour le dernier album du groupe bordelais, « La morsure du Christ », qui avait été un de mes albums phares de 2021, mais j’appréhendais un peu ce que pouvait donner l’ambiance de leurs concerts, surtout dans une salle comme le Petit Bain… Et je peux dire que je n’ai pas été déçue du voyage, et ce dès les premières notes du concert, ouvert par le titre éponyme, bien connu des fans. Les spectateurs, qui s’étaient tenus plutôt tranquilles, attendant l’heure du grand défouloir, pendant les concerts de Thagirion et Merrimack, ont ouvert les vannes et beaucoup se sont mis à pogoter sans fin, en insistant pour donner de nombreux coups de poing et coups de coude, encore et encore, dans les personnes qui ne tenaient pas à s’agiter, dont des personnes assez frêles et petites, des femmes, des photographes… Bref, impossible de profiter vraiment du spectacle malgré tout le décorum sophistiqué à base de tenue de prêtre sataniste pour la chanteur, de bougies, de statues chrétiennes, de verre de vin/sang (logique quand on se fait appeler Saint Vincent), bref toute une installation agréable à l’œil, mais vu le maelstrom constant derrière moi j’ai clairement passé la moitié du concert retournée pour parer le plus possible les mandales octroyées par le groupe de brutes. Je n’ai absolument rien contre les gens qui veulent pogoter et slammer tant que cela reste entre personnes souhaitant pogoter et slammer, entre personnes consentantes en fait, en revanche je ne comprends pas le principe de venir spécifiquement se laisser tomber de tout son poids contre les gens qui ont l’outrecuidance de vouloir profiter d’un concert d’une autre façon, tranquillement, en s’imprégnant juste de la musique… Le tumulte semblait d’ailleurs apprécié par le groupe qui a pas mal encouragé le public à continuer de mettre le boxon. Le son étant toujours aussi mauvais depuis le début de la soirée je n’ai quasiment rien entendu des paroles, en plus d’être en mode survie pour ne pas me faire assommer, ce qui brouille un peu l’écoute aussi : dommage quand l’on pense que Seth a une écriture remarquablement ciselée et recherchée, et un son impeccable en studio ; là le son se rapprochait plus d’un gloubiboulga trop fort, et l’ambiance dans la fosse d’un concert de hardcore ou de grind, youpi. À la fin du show le groupe fit appel à une performeuse pour un petit numéro d’effeuillage à base d’ingrédients se voulant subversifs tout en répondant efficacement au fan service : nudité féminine, mise en scène d’agression, sang de porc versé sur les seins, mime de gestuelle sexuelle avec une statue de la Vierge, petit numéro de feu avec des cubes enflammés… Un interlude esthétique et pas nécessairement utile (sur 17 personnes sur scène pendant 3 concerts successifs une seule était une femme et c’était la seule à poil, ce n’était pas vraiment le sens du hashtag « more women on stage »…) mais qui eut l’avantage d’offrir un petit répit et d’arrêter de me prendre des gnons pendant les cinq minutes où les spectateurs étaient hypnotisés par l’envoûtant pouvoir des femmes nues pour faire joli. J’aurais aimé adorer le concert et passer un excellent moment mais ni l’ambiance générale ni la qualité du son n’ont vraiment permis ça, dommage, malgré les qualités de performers des musiciens et leurs efforts pour fournir un spectacle total.
Set(h)list : 1) La morsure du Christ 2) Métal noir 3) Les océans du vide 4) La Quintessence du mal 5) Hymne au Vampire Acte I 6) Hymne au Vampire Acte II : Vers une nouvelle ère 7) Hymne au Vampire Acte III 8) …À la mémoire de nos frères 9) Le triomphe de Lucifer